La semaine dernière, le documentaire de Todd Sampson, Mirror Mirror: Love & Hate, a été projeté sur Channel Ten. Le documentaire se concentre sur les préjudices qui se produisent via les médias sociaux et les plateformes en ligne.
Cela soulève des points importants sur le besoin de sensibilisation et de réglementation, mais ceux-ci sont souvent évincés par des tropes alarmistes qui ne reflètent pas ce que nous savons de décennies de recherche sur les technologies numériques. S’ils ne sont pas contestés, ils peuvent susciter des inquiétudes inutiles et nous empêcher d’avoir des conversations importantes sur la façon d’améliorer la technologie.
En tant que chercheurs en médias numériques, voici quelques-unes des affirmations que nous pensons que les gens devraient aborder avec prudence.
Technologie numérique et TDAH
Bien qu’il soit judicieux d’éviter de laisser les jeunes enfants passer toute la journée sur des appareils numériques, la suggestion du documentaire selon laquelle l’utilisation d’appareils numériques provoque un trouble déficitaire de l’attention/hyperactivité (TDAH) chez les enfants est discutable.
Le neuroscientifique interrogé à ce sujet note que des études ont trouvé des « corrélations » entre l’utilisation d’appareils numériques et les diagnostics de TDAH, mais le documentaire n’explique jamais aux téléspectateurs que la corrélation n’est pas égale à la causalité. Il se peut que le TDAH rende les enfants plus susceptibles d’utiliser des appareils numériques, plutôt que des appareils numériques causant le TDAH.
Plus important encore, des études longitudinales ont recherché des preuves que l’utilisation d’appareils provoque le TDAH chez les enfants et n’en ont trouvé aucune.
Il y a d’autres raisons pour lesquelles la science ici est beaucoup moins concluante que ne le suggère le documentaire. Les études qui trouvent ces corrélations utilisent souvent les estimations des parents du « temps d’écran » de leurs enfants pour mesurer l’utilisation de la technologie.
Cette méthode est maintenant considérée par certains experts comme une mesure presque dénuée de sens de l’utilisation de la technologie. Les estimations des parents sont généralement inexactes et le « temps d’écran » combine de nombreuses technologies différentes en un seul concept sans tenir compte du contenu regardé ou du contexte d’utilisation.
Le trope des pseudo-connexions
Un autre objectif clé du documentaire est l’idée que les interactions et les relations en ligne ne sont pas réelles et n’ont aucune valeur. Il y a des allégations de «pseudo-connexions» conduisant à une mauvaise santé mentale et à une solitude accrue.
Dans l’ensemble, le documentaire suggère que la communication en ligne est fausse et nuisible, tandis que l’interaction en personne est réelle et bénéfique.
Ce trope bien usé ignore des décennies de preuves sur la valeur des interactions et des relations en ligne. Rester en contact avec ses amis et sa famille à l’étranger, trouver des personnes partageant des intérêts communs, s’organiser et faire du militantisme politique sont autant d’interactions en ligne significatives.
Il est particulièrement important de reconnaître que les amitiés et les interactions en ligne peuvent être cruciales pour les jeunes LGBTIQ+. Ces jeunes souffrent de taux disproportionnés de suicide et de maladie mentale. Cependant, des études ont montré à plusieurs reprises que les outils de communication numériques tels que les médias sociaux leur fournissent de précieuses sources de soutien émotionnel, d’amitiés et d’apprentissage informel, et sont finalement liés à une meilleure santé mentale.
Des inconnus sur Internet ?
Mirror Mirror accorde beaucoup d’attention aux dangers des enfants qui interagissent avec des étrangers en ligne. Son affirmation la plus alarmiste à ce sujet est qu’aujourd’hui, la majorité des amis des enfants sont des inconnus sur Internet.
Cependant, la recherche a toujours montré que les jeunes utilisent principalement les médias sociaux pour se connecter avec des personnes qu’ils connaissent déjà. Cependant, d’autres types d’espaces en ligne, comme les plateformes de jeux, sont également accessibles aux enfants et encouragent les interactions entre étrangers. Des préjudices graves peuvent provenir de ces types d’interactions, bien qu’il soit important de se rappeler que cela est moins courant que vous ne le pensez.
Une étude de renommée mondiale de l’Union européenne sur l’utilisation d’Internet par les enfants fournit une image plus équilibrée. Il a révélé que la plupart des enfants n’interagissent pas avec des étrangers en ligne et que lorsque les enfants rencontrent des amis sur Internet en personne, c’est généralement une expérience heureuse.
L’étude souligne que s’il est important de parler aux enfants de la gestion des risques, rencontrer de nouvelles personnes en ligne peut avoir des avantages, comme trouver des amis ayant des intérêts similaires ou pratiquer une langue étrangère.
Le trope de l’anonymat
Dans le deuxième épisode de l’émission, Sampson déclare que l’anonymat est « peut-être le plus grand tueur d’empathie » dans la communication Internet. Le documentaire ne définit jamais l’anonymat et le présente comme presque exclusivement négatif.
Bien que l’anonymat puisse faire partie de la façon dont les gens infligent des préjudices en ligne, forcer les gens à utiliser leur vrai nom ne les amène pas automatiquement à mieux se comporter.
La recherche a également montré que l’anonymat en ligne est utilisé à de nombreuses fins différentes, y compris positives. Cela peut réduire les méfaits en ligne tels que le doxxing et permettre des interactions sexuelles consensuelles. Cela peut également garantir que les personnes marginalisées se sentent à l’aise d’utiliser Internet sans crainte de représailles.
Mirror Mirror est trop rapide pour présenter l’anonymat comme la cause des abus en ligne plutôt que comme l’un des nombreux facteurs contributifs. Il est important de ne pas perdre de vue ces autres facteurs, en particulier les contextes sociaux de misogynie et de racisme dans lesquels se produisent les abus en ligne.
Les vrais enjeux
Le documentaire comprend des récits déchirants de parents, de jeunes et de femmes qui ont subi des dommages dévastateurs en ligne. Ce sont de vrais problèmes et, comme le note Sampson, la responsabilité de les résoudre incombe aux plateformes technologiques, aux régulateurs et aux éducateurs.
Nous sommes entièrement d’accord et saluons les discussions sur la réglementation des grandes technologies et le développement de campagnes de sensibilisation et d’éducation.
Mais nous aimerions voir une discussion plus pratique de comment les plates-formes doivent changer, et moins de revendications sensationnalistes et de critiques implicites des utilisateurs individuels.